ET SI LA CRISE ÉTAIT PLUS CIVILISATIONNELLE QU'ECONOMIQUE ?
Et si la crise actuelle était avant tout une crise des valeurs ?
Et si nous étions simplement en train de sortir de trois siècles d'histoire ?
Et si c'était une occasion rêvée pour - enfin - se réinventer ?
Et si cela devait conduire à une mutation radicale de nos modes de vies ?
« La confusion des mots finit, toujours, par entraîner celle des choses. La littérature, tout comme l’expérience courante, montre en quoi tout cela aboutit, rapidement, à la confusion des sentiments, c’est-à-dire des modes de vie. Ainsi, dans les périodes de changement, est-il urgent de trouver les mots, sinon totalement justes, du moins les moins faux possibles. Des mots, qui peu à peu, (re)deviennent des paroles fondatrices ; c’est-à-dire assurant les assises de l’être-ensemble en train d’émerger.Comme toutes ces banalités qu’il est important de rappeler, on est au seuil d’une ère nouvelle. Et il est vain de vouloir rafistoler les idéologies élaborées aux XVIII° et XIX° siècles, et dont nous fûmes, dans tous les sens du terme, irradiés. Oui, il faut bousculer les idées rancies, rejeter les analyses apprêtées et quelque peu maussades. En bref, se dessiller les yeux. »
Ces quelques lignes sont tirées du très revigorant livre Apocalypse (ed CNRS) que vient de publier le sociologue Michel Mafesolli. Un livre qui tente de montrer que nous changeons actuellement totalement de monde, et que la crise actuelle n'est qu'un élément d'une mutation sociale et sociétale beaucoup plus large. Pour Maffesoli, les choses sont claires : « l’époque attend sa propre apocalypse c’est-à-dire d’être révélée à elle-même, de pouvoir mettre à jour ce qu’elle cachait. » Et celui-ci d'expliquer dans un récent interview : « S’il y a une crise aujourd’hui, elle n’est surtout pas économique ! On prend un fait pour une cause. La crise, elle est d’abord dans les têtes avant d’être à la Bourse. En fait, comme Jean Baudrillard disait de la Guerre du Golfe en 1991 qu’elle n’avait pas eu lieu, j’oserais dire que la crise n’existe pas. Ou alors par crise, il faut entendre crise sociétale, crise morale, crise des valeurs. »
Cet Atelier s'inscrivait dans la lignée de ceux que nous avions déjà consacrés aux grandes mutations qui agitent notre planète, que ce soit avec Thierry Paquot sur le thème Et si on avait tout faux ?, Jean-Pierre Dupuy autour de la question de Et si on n'avait pas assez peur ? ou, plus récemment, avec Jean-Claude Guillebaud sur la nouvelle modernité métisse.
Les analyses de Maffesoli ont été complétées et questionnées par Charles Wassmer, ancien directeur de la prospective du groupe PSA, et aujourd'hui directeur de l'Oeil prospectif.
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Michel MAFFESOLI, professeur de sociologie à la Sorbonne (Université Paris Descartes).
Il dirige le Centre d’Étude sur l’Actuel et le Quotidien (CEAQ) et le Centre de Recherche sur l’Imaginaire (CRI).
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Charles WASSMER, fondateur de l'Oeil prospectif.
L'Atelier était animé par François BELLANGER.
PS : les dessins illustrant cet Atelier sont issus d'un manga absolument exceptionnel, Tekkon Kinkreet.