ET SI LA VILLE DEVENAIT UN PARC DE LOISIRS ?

Les parcs de loisirs sont-ils devenus les modèles urbains du XXI° ?

Quels sont les grands projets d'équipements de loisirs urbains en cours de réalisation ?

Quelles logiques économiques sous-tendent toutes ces réalisations ?

Lorsqu'en 1996 à la Biennale d'architecture de Venise, la réalisation du pavillon des Etats-Unis fut confiée à Disney, nombreux furent ceux qui s'offusquèrent de cette intrusion de la Mickey's company dans une manifestation jusque-là réservée aux architectes et aux urbanistes.

Si ces réactions ne furent pas vraiment étonnantes (l'anti-américanisme se porte toujours bien en Europe), elles eurent au moins le grand mérite de révéler la totale méconnaissance du rôle des loisirs, et plus particulièrement de Walt Disney, dans l'urbanisme contemporain.

Pourtant, un examen approfondi des éléments qui font le succès de Disneyland et Disneyworld montrent combien ces parcs furent - et sont toujours - parmi les grands incubateurs de l'urbanisme actuel.

Citons cette architecture du réconfort fait d'un façadisme généralisé et qui s'applique aujourd'hui aussi bien dans les centres commerciaux que dans les centre villes rénovés ou dans les néo-villages de nos périphéries.

(Voir à ce sujet l'excellent The Architecture of Reassurance, publié par le Canadian Centre of Architecture de Montréal en 1997)

Citons, aussi, cette valorisation des transports en commun face à la voiture dont Disneyworld en Floride est le symbole même, en étant toujours aujourd'hui la seule ville nouvelle créée depuis un demi-siècle autour du rejet de l'automobile.

Citons, encore, la banalisation du fun shopping dont Disney fut un grand promoteur tant dans ses parcs que dans certains coeurs de villes comme autour 42ème rue à New-York. Modèle copié depuis partout, tant à Sydney qu'à Osaka, Chicago ou Miami et bientôt sur le port de Marseille, et dont Las Vegas est devenu aujourd'hui le modèle.

Citons, enfin, les cités privées qui connaissent actuellement une très forte croissance, et dont la ville de Célébration créée par Disney est l'une des figures les plus emblématiques.

On peut même faire l'hypothèse que le créateur de Mickey sera même bientôt reconnu comme l'un des urbanistes les plus influents du début du XXI° siècle.

Bref, aujourd'hui, le modèle Disney s'est généralisé dans nos villes. A telle enseigne que depuis quelques années on voit apparaître pour dénoncer ce phénomène des expressions telles que disneylandisation de la ville ou de syndrome de la ville en carton pâte.

C'est pour mieux appréhender ces nouveaux rapports entre la ville et le monde des loisirs, et plus particulièrement des parcs de loisirs, que nous avions invité :

• Emmanuel MONGON, Président d'Imaginvest.

  Emmanuel MONGON est l'un des grands spécialistes mondiaux des parcs de loisirs et des loisirs urbains. Il travaille à Singapour, aux Etats-Unis, en Australie et conduit de nombreux chantiers en Europe (Allemagne, Norvège, France, Suisse …). Il vient notamment de réaliser le nouveau masterplan du Prater, site multi-loisirs de 900 hectares au cœur de Vienne en Autriche.